La petite histoire ... de la carotte
La carotte (Daucus carota) de la famille des ombellifères est une plante bisannuelle, c'est-à-dire que son cycle de vie est de 2 ans. La première année, elle forme son appareil végétatif, autrement dit la racine que nous mangeons, ainsi que les feuilles. La deuxième année, après avoir passé les mois d'hiver (qui lui sont nécessaires pour fleurir) la carotte émet des tiges portant des fleurs blanches de mai à octobre, les ombelles, qui donneront ensuite les fruits : les graines de carottes !
L'ancêtre sauvage de la carotte provient de l'Afghanistan bien que l'on puisse trouver des carottes sauvages dans l'ensemble des zones tempérées du globe. La carotte sauvage est une parente de la carotte du jardin, mais elle effectue son cycle de vie sur un an, son cœur est très fibreux et sa saveur amère, elle reste toutefois comestible.
La première carotte charnue, celle qui ressemble le plus à la carotte orange que tout le monde connaît aujourd'hui, est apparue au cours du XVIIème siècle en Hollande à la suite de diverses sélections naturelles. Important : ce que l'on appelle ici sélection naturelle est en fait aujourd'hui appelée sélection paysanne c'est-à-dire une sélection par observation de la plante de la part du paysan. Celui-ci conserve les plantes qui lui conviennent le mieux pour en récupérer ensuite les graines et ainsi de suite, à l'inverse de la sélection de variété hybride en laboratoire où l'on travaille sur le génotype de la plante afin d'isoler certains gènes intéressants. Il en résulte des plantes déséquilibrées et non pérennes malheureusement utilisées par la quasi-totalité des agriculteurs de nos jours... mais pas par nous ! On en discute souvent à la ferme.
Carotte de Carentan, Carotte jaune du Doubs, Carotte Dragon Purple
Carotte de Kuttingen, Carotte Marché de Paris, Carotte Rothild
Les carottes de la ferme
La culture de la carotte en bio, c'est toute une histoire, de nombreux maraîchers s'y sont refusés eu égard à la somme de travail qu'elle représente. C'est certainement le légume qui demande le plus de main d'œuvre : on sème, on arrose, on désherbe plusieurs fois et on détasse, enfin on récolte et on lave... et c'est bon hein ?!
C’est quoi d’ailleurs „détasser“ ? Et bien lorsqu’on sème la carotte, on utilise un semoir qui répartit les graines sur une ligne, puis on laisse germer. La carotte met trois semaines à germer, beaucoup plus longtemps que les mauvaises herbes qui vont coloniser le rang rapidement. Premier désherbage donc. Ensuite, on détasse, c’est-à-dire qu’on enlève les mini-carottes germées qui sont trop serrées dans le rang pour n’en laisser qu’une tous les 2 ou 3 centimètres. Finalement, on sème 4 à 5 fois plus de graines qu’il n’y aura de carottes. Et on désherbe à volonté !
Mais nous à la ferme on aime les carottes, même si c’est du boulot. La terre, dirons certains, ne s'y prête pas car trop lourde, mais bien au contraire cette terre argileuse est remplie de plein de bonnes choses à l'inverse des terres sableuses où les légumes ont le goût d'eau ! La carotte pousse ici lentement et extrait la quintessence de cette terre pour vous livrer sur table un légume d'une qualité biologique hors du commun ! (ah bon?) Et oui nous sommes loin de la carotte insipide gavée de nitrites des grandes surfaces à, oui j'avoue, 80 centimes du kilo...
Les variétés de carottes de la ferme que vous avez l'immense et unique privilège de savourer (sans les éplucher, et oui en bio on n‘épluche pas les légumes) sont:
- Au printemps, les carottes sans coeur fines et pointues : d'Amsterdam, Touchon, de Carentan, et rondes : Marché de Paris, de Guérande
- En automne : les carottes obtuses demi-longues : de Colmar, Rodelika, Rothild, les blanches : de Kuttingen, les jaunes : obtuse du Doubs, les violettes (en 2010) : Purple Dragon, et les rouges : Goutte de Sang
Il existe bien sûr encore des dizaines d'autres variétés, malheureusement comme pour beaucoup de légumes, 80% des variétés existantes au siècle dernier ont déjà disparu... La seule façon de pouvoir continuer à les manger c'est de les cultiver (et de les manger) !
Maxime le maraîcher